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Mayotte : des soignants face au chaos

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22.01.25
Le 14 décembre, le cyclone Chido dévastait Mayotte, détruisant presque tout sur son passage : habitations, infrastructures, plantations, etc. Encore incertain, le bilan humain fait état, à ce jour, d’une quarantaine de morts et de près de 6 000 blessés. Sur place, la communauté des chirurgiens-dentistes s’organise.

Le passage du cyclone Chido a fait craindre le pire pour Mayotte, un département français déjà en proie à de profondes crises liées à la pauvreté, l’insécurité, le manque d’eau (30 % des habitations ne disposent pas de l’eau courante), auxquelles s’ajoute une vulnérabilité structurelle des services de santé. Des rafales allant jusqu’à 200 km/h ont frappé l’archipel de plein fouet, le 14 décembre. « Toute mon équipe se retrouve littéralement sans toit, rapporte le Dr Nolwenn Lepouriel, chirurgien-dentiste au centre hospitalier de Mayotte (CHM) à Mamoudzou. Ce jour-là, la praticienne était, comme beaucoup de confrères, en métropole. « Cette période correspond aux grandes vacances pour nous, souligne celle qui ne lâche plus son smartphone pour échanger avec ceux qui sont sur place. Dans ce chaos, ils ont fait preuve d’un courage fou pour mettre le matériel à l’abri et sauver ce qui pouvait l’être. » 

Assurer les urgences

Relativement épargné, le service d’odontologie du CHM qui compte sept équivalents temps plein dont trois titulaires, a pu rouvrir rapidement pour assurer une permanence des soins. Deux des quatre fauteuils accueillent des patients. « Nous avons également des consultations dans trois centres périphériques que les collègues ont assurées comme ils ont pu, rend compte le Dr Lepouriel. Au début, ils sont surtout allés prêter main forte aux urgences pour suturer des plaies. De toute façon, avec les axes coupés et les rationnements d’essence, il était très difficile pour les Mahorais de se déplacer. À Mayotte, nous avons l’habitude des crises tant les moyens manquent… et depuis longtemps. » 

Solidarité confraternelle

Très vite, la communauté des chirurgiens-dentistes s’est organisée. « L’URPS Océan indien a tout de suite créé un groupe sur les réseaux sociaux pour que les praticiens, hos-pitaliers comme libéraux, puissent échanger et communiquer sur leurs besoins », indique le Dr Lepouriel. Elle a également « mobilisé ses fonds et lancé une cagnotte pour faire parvenir des groupes électrogènes aux confrères libéraux », explique le Dr Schosmann, membre de l’URPS et président des CDF La Réunion.
De son côté, l’UFSBD a œuvré pour faire parvenir du matériel avec l’aide de l’entreprise Henry Schein. « L’entrepôt où sont stockées nos fournitures pour le semestre voire l’année à venir a été totalement soufflé, précise le Dr Lepouriel. En attendant, les collègues ont puisé dans les réserves que nous avions au CHM et dans les consultations périphériques. »

Dégâts inégaux chez les libéraux

Côté libéral, les conséquences du cyclone Chido sont inégales en fonction du bâti et de la situation géographique des cabinets. L’Ordre enregistre 12 praticiens en exercice libéral. Parmi eux, le Dr Yves Burgard, pédodontiste, mesure sa chance : son appartement n’a plus de toit mais son cabinet, situé dans un bâtiment neuf du sud de l’île, a été épargné, à l’exception d’une infiltration d’eau sans conséquence. « Les confrères installés dans le nord ont été durement touchés. Une consœur orthodontiste ne peut plus utiliser son matériel, le cabinet a pris l’eau. Un autre attend le passage des experts pour rouvrir… »
Lui a pu reprendre son activité quelques jours après le cyclone. « L’électricité est revenue assez vite et depuis la crise de l’eau, l’ARS a équipé les libéraux de cuves et de systèmes pour traiter l’eau, souligne-t-il. Mon seul souci était la communication avec les patients. Les lignes fixes ne fonctionnaient pas. Mais un confrère de l’hôpital m’a trouvé une box internet. Les patients ont commencé à revenir pour des soins programmés ou des urgences du type abcès, pulpites…  Aujourd’hui, je me demande surtout si les soignants, eux, reviendront. » 

Hémorragie de praticiens

Mayotte, c’est environ cinq chirurgiens-dentistes pour 100 000 habitants (contre une soixantaine en métropole) « avec des pathologies beaucoup plus importantes et un indice carieux bien plus élevé que la moyenne nationale », souligne le Dr Burgard. Le nombre de praticiens pourrait encore baisser prochainement. « Chez les libéraux, nous sommes plusieurs à avoir dépassé l’âge de la retraite et à ne plus travailler à temps plein, souligne le septuagénaire qui se dit pourtant prêt à poursuivre encore trois ou quatre ans à un rythme modéré. Avant Chido, certains confrères avaient annoncé qu’ils cesseraient leur activité ou qu’ils partiraient exercer ailleurs, même si travailler à Mayotte revêt des aspects très plaisants. Les Mahorais, par exemple, sont des patients reconnaissants et donnent toute leur confiance, notamment les enfants qui sont incroyablement faciles à soigner. » Même crainte au CHM. « Certains soignants ne reviendront pas », avance le Dr Lepouriel qui compte déjà une démission dans son service. La praticienne, qui repart pour Mayotte dans quelques jours, sera hébergée chez des amis tandis que sa famille reste en métropole. « Je n’ai pas envie de jeter l’éponge mais combien de temps allons-nous tenir comme ça ? Quelles solutions ? Faut-il organiser une base arrière à La Réunion ? Les réponses se font attendre… »
Une réunion organisée par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes était prévue le 17 janvier dernier. « Qu’il s’agisse de moyens humains ou financiers, des pistes sont étudiées pour venir en aide aux confrères et à leurs patients, indique le Dr Schosmann. Il faut agir… et vite. »

Politique

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